livre de l'exode | paracha : Terouma |
RESUME. — La grande confrontation d’Israèl avec D. lors de la “‘ianifestalion du Sinaï a donné au peuple la notion précise des tâches rue D. lui assigne devenir une nation de prêtres et un peuple saint. Dans sa vie sociale, comme dans sa vie individuelle, Israèl est appelé : réaliser le plan divin tel qu’il ressort des communications que Moïse reçues durant son séjour dans la proximité de D. Dorénavant, la présence du Créateur de la nation doit effectivement diriger toutes .Tes activités juives et la construction du Tabernacle dont a idra nous entretient en est le symbole vivant et éloquent. Par des contributions rolonlaires et individuelles, les chefs du peuple réunissent tout le matériel nécessaire pour édifier le sanctuaire qui doit témoigner de .a constante coordination des possibilités humaines et des directives divines. Les objets destinés à figurer à l’intérieur du sanctuaire sont Iautel en or pur, le chandelier à sept branches, la table en bois de ehiltim et surtout le Tabernacle, simple arche de bois, place dans la partie réservée du sanctuaire appelée «le saint des saints Le sanctuaire lui—même sera construit en solives de bois précieux, reposant sur des pieds d’argent massif et il sera recouvert de tapis multicolores reliés les uns aux autres par des agrafes d’or. Le parvis du sanctuaire, composé de piliers en bois posés sur des socles de cuivre, sera entouré de toiles accrochées par des tringles et des crochets aux piliers, le tout constituant une enceinte d’environ quatre vingts mètres sur trente et formant le centre du campement d’où rayonnent les emplacements harmonieusement disposés des douze tribus d’Israél. |
![]() La paracha TÉROUMA contient 2 commandements positifs et une interdiction. 95. Construction du sanctuaire. |
COMMENTAIRE
L’ARCHE. — Construite en bois précieux, l’arche est recouverte d’or pur et~ munie de barres en bois de façon à être portée sur les épaules des prêtres. Deux chérubins d’or sculptés en relief sur le couvercle de l’arche déploient leurs ailes protectrices sur le précieux contenu du Tabernacle, les tables en pierre sur lesquelles se trouvent gravés les commandements que D. a énoncés de vive voix au cours de la Révélation. Pour la première fois, nous voyons apparattre ici ces barres qui figurent également auprès de l’ensemble des objets sacrés et qui ne sont certainement pas uniquement destinées à en faciliter le transport. En effet, il aurait été plus simple et plus commode de charger ces objets sur les voitures qui feront également partie des constructions prévues. Il semble plutôt que l’idée exprimée par ces barres soit la mobilité, l’indépendance de lieu et de temps du sanctuaire. Même au repos, les barres restent à leur emplacement, en d’autres termes, la loi d’Israèl n’entend pas être liée à une place déterminée et doit trouver de nouveaux porteurs chaque fois que les circonstances l’exigeront. Tout autour du couvercle se trouve une corniche en or qui semble former barrière contre tout essai de modification et de transformation. Ce n’est que derrière la corniche que se trouve la Loi. Les deux chérubinF, suivant la tradition, remplissent une double fonction. Ils tendent leurs ailes en haut, vers D. et protègent en même temps le précieux objet dont ils sont les gardiens immuables. Cela signifie certainement, que la double fonction d’Israèl, établir un rapport continuel et constructif entre l’homme et son Maître, protéger sur la terre le trésor de pureté et de justice dont la parole de D. lui a donné le secret, trouve ~ci son expression symbolique. Partout ce dualisme de notre mission apparaît. Les tables sont doubles, l’arche elle-même est composée dc deux éléments (bois et or) et les deux chérubins accomplissent une double garde. Ainsi devient visibje la nécessité pour le Juif de réaliser, tout en respectant le caractère particulier des deux éléments, une synthèse toute nouvelle entre la puissance humaine et l’appel de D., la première soumise à toutes sortes de fluctuations, de faiblesses et d’incertitudes (le bois), et la pureté, la noblesse, le caractère immuable de la Loi divine (l’or). C’est en recouvrant le bois qu’on lui donne la durée, voire même l’éternité. C’est en appuyant nos efforts sur la parole de D. que nos faibles réalisations humaines prennent de la valeur et deviennent capables de s’élever au-dessus de la misère et de l’insuffisance terrestres.
LA TABLE. — Essentiellement appelée à représenter le côté matériel de notre existence, la table place devant le Tabernacle nos préoccupations en vue d’obtenir une vie exempte de soucis. Douze pains, cuits à la manière des « matsoth », sont placés sur la table en deux rangées de six. Un pain porte l’autre, et toutes les semaines, au début du Shabbat, les douze pains sont échangés contre douze autres. Le nombre de douze est sans doute choisi en relation avec les douze tribus d’Israèl et leur juxtaposition, leur soutien mutuel expriment l’idée que, sur la base d’une fraternité véritable, tout problème matériel peut trouver, une bonne solution. D’autre part, la mesure de farine dont chaque pain était composé était le double
de la ration allouée dans le désert par la manne quotidienne. Là aussi se retrouve l’appel à la responsabilité sociale ne pas seulement se préoccuper de son propre bien-être, mais inclure dans sa pensée le souci du prochain. Les deux rangées des douze pains sont supportées par des colonnes en or qui symbolisent l’ossature du droit divin, seule capable de donner à toute institution sociale son vrai maintien et une durée à toute épreuve.
LE CHANDELIER. — Sans aucun doute, le chandelier représente devant D. le deuxième élément de notre vie d’homme, notre activité spirituelle. Le nombre de branches, sept, suffit à lui seul à préciser cette idée. La lueur du milieu, légèrement inclinée vers le Tabernacle, réunit et attire à elle les six lumières qui l’entourent. Ne serait-ce pas là le symbole des six jours de la semaine qui doivent recevoir leur inspiration de l’éclatante clarté du Shabbat, septième lumière du chandelier de la vie ? Chaque branche se compose de calices, de boutons et de fleurs et l’ensemble nous paraît indiquer la manière dont l’esprit et la capacité de travail intellectuel doivent être dirigés pour atteindre le maximum de lumière. A la base il y a le calice, la coupe qui reçoit le précieux liquide. Donc première phase de toute activité spirituelle du Juif recevoir, absorber. Le deuxième élément est le bourgeon qui opère, par un travail tout intérieur, s~ns auc-une~ trace visible, la mise en valeur, la prise de possession de ce qui a été reçu. Alors, après réception et transformation, la fleur peut apparaître, produit harmonieux du concours des différents éléments. Le chandelier est d’un seul bloc, sans aucune soudure, sans apport extérieur. L’esprit de la Thora ne peut. subir aucun mélange, aucune adjonction qui ne pourrait que le déformer. Sa seule lumière suffit à éclairer le monde, et tout le vaste domaine des interprétations humaines reçoit son inspiration vivifiante de la pensée juive telle qu’elle est reflétée par la Loi. Un détail: la fleur est en forme de fleur d’amande. L’amandier est l’arbre qui, non seulement. est le premier à fleurir, mais encore produit ses fleurs avant ses feuilles. En d’autres termes, l’esprit de la Thora, garant de la continuité de l’espèce humaine et de son avenir (la fleur, porteur du germe reproducteur) est la condition préalable de la vie et de l’existence matérielle même de tout individu (la feuille qui procure à l’arbre les éléments indispensables à sa subsistance). C’est seulement lorsqu’est assurée une base solide à l’accomplissement et au perfectionnement du genre humain que la vie de chacun peut raisonnablement prendre sa place dans la chaîne des générations. Isolés, nous ne sommes rien, nous ne prenons toute notre valeur de bâtisseurs que dans l’immense suite des siècles qui, lentement mais sûrement, nous conduisent vers le bonheur.
L’EDIFICE. — Composés de piliers en bois et solidement reliés par des traverses, les trois côtés du sanctuaire laissent l’entrée béante, fermée uniquement par un rideau. D’après la tradition, une traverse invisible courait tout le long des trois côtés et donnait à l’ensemble de la construction une unité parfaite. Quatre traverses visibles, deux à l’intérieur et deux à l’extérieur, la complètent. Peut-être est-ce là une allusion aux quatre mères dont descendent les douze tribus d’Israèl, mais qu’un seul père, Jacob, unit dans une famille réelle. Quatre groupes se distinguent à l’intérieur du peuple la direction spirituelle, la direction politique, la paysannerie et le commerce. Chacune de ces quatre branches est représentée par une tribu dirigeante. Lévi: chef spirituel. Juda, chef politique. Zabulon, grand commerçant, explorateur des mers, et Naphtali, assuré de la bénédiction de l’Eternel. Leur diversité n’est qu’apparente, ils sont tous unis par la traverse intérieure, par le même souffle qui leur vient de l’héritage de Jacob.
L’AUTEL. — Majestueux, l’autel se dresse sur le parvis du sanctuaire. Sur un bloc massif de terre, ses panneaux s’élèvent pour former un cube couronné du plateau sur lequel Israèl apportera ses sacrifices. Le texte insiste sur le caractère parfaitement cubique de l’autel. Il n’est peut-être pas trop osé de constater son analogie avec un autre cube plus petit mais aussi parfait, tel qu’il existe dans les phylactères, les «tephillines ». Là aussi, la prescription de cette forme précise demande à être expliquée. Essayons de voir les deux sous le même angle. L’autel est l’endroit où, symboliquement, tout notre être, toute notre personne humaine avec toutes ses facultés, est consacrée à D. C’est l’essence de notre corps et de notre âme, représentée par le sang, porteur de la vie et aussi facteur prépondérant de notre âme (la Thora n’appelle-t-elle pas le sang: sang de l’âme, sang de la vie) qui est sanctifié, élevé vers D. D’autre part les « tephillines» entourant le bras et la tête entendent soumettre au service du Seigneur tout ce que les bras et la tête de l’homme peuvent produire. C’est-donc véritablement notre pouvoir constructif, notre qualité d’associé de D. dans le plan universel qui est l’objet de l’une comme de l’autre des deux sanctifications : celle de l’autel comme celle des tephillines. Il n’existe pas de symbole plus éloquent de l’activité libre, raisonnée et consciente de l’homme que le cube, dont tous les côtés sont strictement de la même dimension, qui est dûe à la main savante de l’être humain. Il est même possible de prétendre que le cube parfait, contrairement. aux autres formes géométriques, ne se retrouve nulle part spontanément dans la nature. Donc, chaque fois que la Loi fait appel à nos qualités constructives et à leur intégration dans le plan divin, le cube apparalt comme caractéristique d’une action symbolique agissant sur notre volonté d’être dignes de notre mission d’hommes.
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